Mazarine Pingeot étrille « le populiste » Cyril Hanouna
La fille de François Mitterrand n’a pas supporté de voir le présentateur attaquer frontalement l’audiovisuel public. Et juge dangereuse son émission.
Par Marc Fourny

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Nouvelle charge contre Cyril Hanouna, cette fois venue de Mazarine Pingeot, la fille de François Mitterrand. La romancière et professeure de philosophie, qui mène désormais des interviews sur LCP, n’a pas digéré de voir l’animateur appeler à la privatisation de l’audiovisuel public et fustige le pouvoir dont il jouit sur C8. « Je pense qu’il incarne le populisme dans toute sa splendeur et qui est quand même propre aussi à notre époque », a-t-elle jugé sur le site Puremédias. « Cyril Hanouna a un pouvoir dément dans le sens où ce qu’il dit a malheureusement beaucoup d’impact. Il a les moyens de le diffuser aussi tout simplement : il a une chaîne entre ses mains. […] Aujourd’hui, on voit qu’il y a des paroles sans légitimité qui ont du pouvoir. Cela pose un problème, d’autant plus que l’on parle là d’un pouvoir dément. »
Et de pointer du doigt une course à l’audience qui entraîne tous les dérapages. « Le résultat de ce qu’il propose, à savoir la privatisation des chaînes, c’est exactement ce qu’il est : une chaîne avec toujours plus d’entertainment et entraînée dans une course aux profits. La course aux profits fait que la parole n’est plus indexée ni à la vérité ni à la vérification des faits, mais au buzz. Pour que quelque chose marche, on va jouer sur l’émotion et le clash. Le fact-checking, qui est peut-être moins sexy, va passer à la trappe. Donc c’est ultra-dangereux : bien sûr qu’il faut préserver le service public. »
Abandon de la réflexion
La fille de l’ancien président de la République, qui n’a jamais caché son engagement à gauche, déplore le manque d’espace accordé sur l’audiovisuel au débat et à la réflexion. « Le problème est structurel : pour ne pas être réduit au clash, le débat a besoin d’un temps minimal, poursuit-elle sur Puremédias. Pour garantir de bonnes conditions à un débat, il faut du temps, de l’espace et une qualité des débatteurs : cela fait beaucoup de conditions pour des émissions qui ont besoin de rentabilité. C’est un vrai problème politique, là, pour le coup ! » Tout l’inverse de ce que propose Hanouna à ses yeux.
À LIRE AUSSIMazarine Pingeot : « Mon père m’a transmis le goût de la liberté » Il faut dire que le trublion de C8 a franchi plusieurs fois la ligne rouge ces derniers mois. D’abord en ayant insulté, en novembre, le député Louis Boyard (LFI) sur le plateau de TPMP – ce qui vaut à la chaîne une amende de 3,5 millions d’euros –, puis avec une longue diatribe, en janvier dernier, contre le service public audiovisuel et sa dotation de 3,8 milliards allouée chaque année – « Privatisez-moi tout ça ! » lâchait-il sans retenue. Une sortie qualifiée d’indigne par plusieurs responsables, dont la ministre de la Culture, qui a rappelé que C8 avait « des obligations à respecter », sachant que l’autorisation d’émettre de la chaîne doit être renouvelée dans seulement deux ans.
À LIRE AUSSICyril Hanouna, la ministre de la Culture et les « rageux » Pour son retour à la télé, Mazarine Pingeot promet en tout cas de l’anti-Hanouna : pas de buzz ni de clash, mais des interviews qualitatives dans le cadre des Grands Entretiens, qu’elle anime désormais sur La Chaîne parlementaire, à tour de rôle avec Yves Thréard et Daphné Roulier. « Je demande à des philosophes de questionner le monde contemporain, explique-t-elle à nos confrères de Puremédias. Le but est de toucher du doigt des réponses, mais surtout d’analyser les différents sujets de manière globale. » A-t-elle des objectifs d’audience ? « LCP est constituée d’un public curieux, juge-t-elle. Il ne faut pas avoir peur de l’exigence et mépriser son public. Il y a des gens qui aiment les choses un peu radicales. Sinon, il est facile de trouver des choses peu exigeantes, il y en a partout. » Suivez son regard…